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Prix littéraires sous tension

Publié le 28 novembre 2024
écrit par La Rédaction et illustré par Studio Plastac

Ce mois de novembre est marqué par la grande actualité littéraire de chaque fin d’année : l’attribution du prix Goncourt (Houris de Kamel Daoud aux éditions Gallimard) et du prix Renaudot (Jacaranda de Gaël Faye aux éditions Grasset). Deux récompenses prestigieuses souvent mises à l’honneur dans FLAASH mais dont la première est aujourd'hui sous le feu d'une vive polémique à l'encontre de l'écrivain primé.

Après la récompense, la polémique. Alors que le prix Goncourt 2024 vient d’être attribué à Kamel Daoud pour son roman Houris aux éditions Gallimard, deux plaintes ont été déposées en Algérie en août dernier (mais n’ont été rendues publiques que mi-novembre). Elles portent sur la violation du secret médical et la « diffamation des victimes du terrorisme et la violation de la loi sur la réconciliation national ».

L’auteur est accusé d’avoir utilisé le témoignage d’une rescapée de la guerre civile en Algérie dans les années 1990, pour écrire Houris. Témoignage qu’il aurait eu grâce à une violation du secret médical de sa femme, psychiatre. La plaignante affirme en effet que son histoire personnelle est celle décrite dans le livre et que les détails qui y figurent sont issus d’une thérapie effectuée en 2015 auprès de l’épouse de l’auteur franco-algérien.

La maison d’édition a tout de suite réagi, affirmant qu’il s’agissait là de « violentes campagnes diffamatoires orchestrées (contre l’écrivain) par certains médias proches d’un régime dont nul n’ignore la nature », et précisant que « Si Houris est inspiré de faits tragiques survenus en Algérie durant la guerre civile des années 1990, son intrigue, ses personnages et son héroïne sont purement fictionnels ».

Le roman Houris est proscrit en Algérie et l’affaire suit son cours. En attendant, le débat est relancé : quelle part de « réel » accepte-t-on dès lors que l’on attribue le terme de « fiction » à un ouvrage ou à des personnages ?

En attendant d'y voir plus clair, plongez-vous dans une sélection personnelle des prix Goncourt qui ont marqué les esprits de la rédaction. Une liste de six ouvrages qui n’ont pas toujours un lien avec l’anticipation, mais qui parlent souvent de mémoire. Et pour construire le futur, il faut aussi et avant tout regarder le passé. [Se] souvenir [pour ne pas] recommencer, des verbes souvent mis à l’épreuve ces temps-ci…

Commençons avec Les Racines du ciel (1956), un livre magnifique de Romain Gary, souvent dans l’ombre du célèbre La Promesse de l’aube (1960), et pourtant si puissant. Il est question de parcours, de destins, de préservation de la nature et d’indépendance dans l’Afrique coloniale du milieu du XXe siècle.

Continuons avec La plus secrète mémoire des hommes (2021) de Mohamed Mbougar Sarr, où la quête du « Rimbaud nègre ». Un roman qui mêle tragédies coloniales, Shoah et espoir, une oeuvre dont le style d’écriture, parfois élitiste, est une prouesse en soi. Le titre du livre de Jorge Semprún pourrait d’ailleurs en résumer son contenu : L’Écriture ou la vie (1994).

Puis Tous les hommes n’habitent pas le monde de la même façon (2019) de Jean-Paul Dubois, un prix Goncourt drôle et accessible pour aborder la question de l’injustice. Sans savoir pourquoi, vous chercherez vous-même à comprendre Paul Hansen, personnage principal de l’histoire. Si vous n’avez jamais osé lire un prix Goncourt, lancez-vous avec lui.

Et que dire de celui qui fête aujourd’hui les 20 ans de son attribution ? Il occupe une place toute particulière dans notre liste, puisqu’il s’agit du roman Le Soleil des Scorta (2004) de Laurent Gaudé, l’invité culturel du prochain numéro de FLAASH sur les pénuries. On ne vous en dit pas plus sur le livre lui-même, puisque tout sera analysé (ou presque) dans l’entretien à paraître le 04 décembre prochain, sinon qu’il a prononcé ça : « Je ne connais pas ce lien qu’un Corse peut avoir avec la Corse ».

Quel rapport ? Une transition pour la suite ? Et oui, car s’il y a bien un écrivain qui connaît la Corse et qui s’en inspire en permanence, c’est l’auteur primé en 2012 pour Le sermon sur la chute de Rome : Jérôme Ferrari. Un bar devenu le centre du village, un empire français qui décline et des destins racontés en sept parties, toutes portant le nom de phrases extraites du fameux Sermon sur la chute de Rome d’Augustin Hippone en 410.

Envie de rester sur une thématique italienne pour finir ? Veiller sur elle (2023) de Jean-Baptiste Andréa est là pour ça. Un roman de pierre, deux destins tragiques que tout oppose, une statue cachée par le Vatican et une Italie fasciste qui gronde.

Vous savez ce qu’il vous reste à faire, ou plutôt, à lire.

Ps : Et ce en plus de la lecture indispensable des livres de nos précédents invités lauréats, à savoir Panorama de Lilia Hassaine (prix Renaudot des Lycéens 2023 aux éditions Gallimard), L’Anomalie d’Hervé Le Tellier (prix Goncourt 2020 aux éditions Gallimard), ou encore Leurs enfants après eux de Nicolas Mathieu (prix Goncourt 2018 aux éditions Actes Sud). Une adaptation cinématographique de ce dernier sort le 04 décembre prochain.

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